Le gin est l’évolution d’une eau-de-vie très ancienne, le Genever ou Genièvre (provenant du nom de la baie). Elle a été produite pour la première fois au XVIIe siècle aux Pays Bas. Cette eau de vie se serait répandue en Angleterre quand Guillaume d’Orange-Nassau, prince hollandais, devint roi d’Angleterre. En effet, du fait de l’interdiction d’importation d’eaux-de-vie étrangères, les distilleries anglaises de l’époque se mirent à produire en grande quantité une variante plus accessible du Genever qui est baptisée : le Gin.
Le Gin Old Tom est une catégorie de gin à part entière, apparue au XVIIIème siècle en Angleterre, époque de forte consommation d’alcool et de distillation illégale. Les gins de l’époque étaient de bien piètre qualité : certains distillateurs sans scrupule allaient même jusqu’à couper leurs spiritueux à la térébenthine et à l’acide sulfurique, produisant ainsi des gins peu coûteux mais difficilement buvables et nocifs pour la santé. Le mauvais goût de cette “eau-de-vie” de genièvre était alors atténué par l’ajout de réglisse, d”épices et de sucre. Ainsi naquit le Gin Old Tom, ancêtre de tous les gins, caractérisé par sa douceur et sa rondeur apportées par des éléments sucrants.
Plusieurs rumeurs se targuent d’élucider le mystère des origines du nom “OLD TOM”. La plus répandue nous emmène à Londres en 1736 où le réputé capitaine Dudley Bradstreet se serait mis à fabriquer un gin de contrebande qu’il aurait fait vieillir dans sa baignoire en y ajoutant une touche de sucre. Il aurait orné sa fenêtre d’un chat peint en noir, surnommé Tom, et fit savoir à la ville qu’il était possible de se procurer un gin doux et délicat en suivant le chat noir. Sous la patte du chat se trouvait une fente et un tuyau en plomb venant de l’intérieur de la maison. Si vous criiez “Minou” devant la fenêtre et que vous obteniez un “Miaou” comme réponse, il suffisait de déposer une pièce dans la fente et de placer votre tasse ou directement votre bouche sous le tuyau pour récupérer le précieux breuvage. L’idée de Bradstreet fut bientôt copiée dans tout Londres et très vite, le Old Tom devint un surnom affectueux pour les gins intenses et légèrement sucrés. Le capitaine Bradstreet prétendait d’ailleurs par la même occasion avoir inventé un tout nouveau style de distribution d’alcool, connu dans l’histoire sous le nom de magasin Puss & Mew.
Une rumeur plus sinistre conte l’histoire d’un matou tombant dans une cuve de gin à laquelle il aurait donné son nom (Tom). Ragoûtant !
Quoi qu’il en soit, , avec des félins dessinés sur de nombreuses bouteilles ou tonneaux à travers l’Angleterre et les âges comme le montre l’exemple du distillateur Joseph Boord qui déposa en 1849 la marque “Cat and Barrel” pour son Old Tom.
Une troisième et dernière rumeur concerne un distillateur du nom de Thomas Chamberlain et son apprenti Thomas Norris, auquel il enseigne ses méthodes à la distillerie Hodge. Lorsque Norris (le jeune Tom) eut terminé son apprentissage, il ouvrit son Gin Palace dans Great Russell Street, à Covent Garden. L’un des premiers gins qu’il mis en vente se distinguait par ses arômes intenses et sa texture douce et sucrée, et portait le nom “Old Tom”. Il semblerait que Morris ait donné ce nom à son gin en hommage à son mentor.
Quelle que soit son origine et la véracité de toutes ces rumeurs, il est certain que ce style de Gin a été popularisé à l’époque du Gin Palace et immortalisé dans l’illustration The Gin Shop de George Cruikshank en 1829.
Le Old Tom d’alors est travaillé méticuleusement et se différencie drastiquement des mauvais produits des années 1730. Sa complexité aromatique et sa douceur lui ont permis de dominer la scène du gin pendant des décennies, et il a laissé sa signature dans de nombreuses recettes de cocktails iconiques : le Gin Old Tom est mentionné par Jerry Thomas pour son Martinez Cocktail (Martini) dans son ouvrage de 1887 Bartender’s Guide, How to Mix All Kinds of Plain and Fancy Drinks. Il est pour la première fois mentionné dans la préparation du Tom Collins par l’ouvrage de 1891, The Flowing Bowl: When and What to Drink.
Depuis, les goûts des consommateurs ont évidemment bien évolué grâce notamment à la découverte de la distillation en colonne permettant de produire des styles de gins plus secs comme le “London Dry”. Ce dernier a su conquérir les cœurs des consommateurs dans les années 70 pour devenir la catégorie de gin la plus populaire.